Des nouvelles fantastiques au collège Jean-Vilar
En six séances, une soixantaine d’élèves de 4e du collège Jean-Vilar, répartis en quatre groupes d’enseignements pratiques interdisciplinaires (EPI), ont créé quatre nouvelles fantastiques : “Le train fantôme”, un voyage qui se transforme en cauchemar ; “Ring”, un boxeur qui prend sa vie en main ; “Malédiction au lycée”, quatre adolescents se confrontent à d’étranges disparitions ; “Seuls”, quatre jeunes isolés après l’apparition d’une fumée insolite. Initié par cinq enseignantes — quatre de français, Elodie Ecochard, Nawel Rachidi, Fabienne Belle et Chloé Melin ; une de musique, Cécile Colas —, en collaboration avec la documentaliste Marie Moreno du CDI de l’établissement, le projet a permis aux élèves de découvrir l’univers de ce genre littéraire, de s’emparer de l’écriture sur un mode ludique en déployant leurs ressources imaginaires.
La Maison des écrits, l’auteure Laurence Peyrin et le Labo des Histoires ont animé les ateliers d’écriture. Avec le concours de leur professeure de musique, du sound designer Arnaud Gimenez de Dcap et de l’animateur Tony Bemba de la MJC Desnos, les élèves ont enregistré leurs nouvelles illustrées d’ambiances sonores. Ils ont aussi composé les éléments graphiques des couvertures, accompagnés par l’artiste visuelle Katheryne Pichette. “Ces 24 ateliers au total, hors les murs du collège, ont été de véritables espaces d’échanges entre les élèves, leurs professeures et les différents intervenants”, observe Marie Lorenzin, responsable de la Maison des écrits.
Fiers de leurs récits
Quand les jeunes relatent cette aventure, on ne doute pas un seul instant de leur intérêt. Ils disent tous et toutes leur “impatience” de retrouver à chaque séance l’auteure Laurence Peyrin, de découvrir son travail d’écrivaine. “Cette expérience a été géniale pour nous, car elle nous a permis de nous lâcher, de nous exprimer librement, d’apprendre beaucoup de mots et de voir la lecture autrement. A partir de rien, nous avons abouti à une histoire qui nous plaît”, dit l’un des groupes. “Nous sommes fiers de ces nouvelles qui reflètent nos imaginations. Nous nous sommes serré les coudes. Laurence Peyrin nous a permis d’approfondir nos capacités d’écrire, de comprendre les différentes étapes dans la construction d’une nouvelle. Nous avons apprécié tous ses précieux conseils, qui nous ont donné envie d’écrire”, résume un autre groupe. Plaisir, enthousiasme donc, même si “l’écriture a parfois été compliquée dans la création des personnages, la recherche de vocabulaire”.
Le pari d’écrire
Laurence Peyrin a eu à cœur de transmettre “la joie et la facilité de créer, de sortir les collégiens des carcans scolaires, de leur montrer le chemin parcouru, des personnages qui naissent alors qu’ils n’existaient pas une heure avant, une intrigue qui fait une nouvelle…”. Son approche est davantage de l’ordre du pari. “Vous pensez que vous allez vous ennuyer ? Et bien on en reparlera quand vous aurez créé quelque chose dont vous n’avez même pas encore idée”, les avait-elle avertis.
Pour l’écrivaine, il y a plus encore, une urgence, le sentiment d’une immense “bataille” face aux technologies du divertissement comme le Net ou les jeux vidéo. Face “à leur patience limitée, leur ambition annihilée par un système trop rapide, qu’ils croient pourtant dominer, avec la défiance de leur âge”, elle veut leur montrer “qu’ils peuvent être acteurs, et pas seulement spectateurs”.
Valorisations
Lors de la manifestation Tempo Libre, samedi 20 mai, les professionnel-les du réseau des bibliothèques et de la Maison des écrits, ainsi que des habitantes, ont lu les quatre nouvelles fantastiques dans le Bouquinbus, tandis que le Petit train circulant dans les quartiers en diffusait des extraits. Les textes sont également affichés au CDI du collège. Cette valorisation se poursuivra durant une semaine d’exposition qu’organise l’établissement autour de la Journée des talents, mi-juin.
Enfin, les élèves ont pu rencontrer l’écrivaine Gaia Guasti, à l’initiative du réseau des bibliothèques. Ils avaient lu en totalité ou partiellement le premier tome de sa trilogie fantastique “La voix de la meute”, dont la bibliothèque Neruda avait prêté des exemplaires. Le roman, véritable métaphore de l’adolescence au travers de la transformation de trois amis d’enfance en loups-garous, a été travaillé en classe de multiples façons. Gaia Guasti a évoqué ses techniques d’écriture, ses recherches documentaires, sa passion des livres dès toute petite, son goût du récit, ses auteur-es préférés, son activité de scénariste de films, ses origines italiennes et son rapport à la langue française… Un échange dense, ponctué des questions et ressentis des élèves, et bien sûr de la lecture de leurs quatre nouvelles, saluées chaleureusement par l’écrivaine.