La Biennale de design graphique : 3 expositions à découvrir absolument
Trois expositions bien différentes mais chacune avec son propos, et surtout une grande exigence. En prenant comme thématique la scénographie, le TRACé livre des expositions qui s’approprient autant les œuvres que les lieux. En ressort des visites chargées d’émotions qui s'expriment par la photo de Viscosiers contemplant les œuvres numériques, par un arbre qui se poursuit vers le parc Géo-Charles, par une issue de secours au bout du chemin de la lutte climatique...
Centre du graphisme
2 degrees petition, banque d’images et urgence climatique
C’est à partir d’une pétition d’œuvres en ligne que l’exposition 2 degrees-petition s’est construite. Un appel a tous les graphistes professionnels et amateurs à s’exprimer sur l’urgence climatique qui nous menace. Un manifeste en ligne qui s’empare du Centre du graphisme. Jacqueline Madrennes, adjointe à la culture, le souligne : "Cette exposition fait un écho fort aux sujets de lutte actuels, aux manifestations de rue souvent initiées par notre jeunesse." Manifestation qui se ressent au travers les œuvres portées comme des pancartes par des silhouettes faites de matériaux recyclés, par le choix d’une empreinte carbone neutre en privilégiant les lumières naturelles. Une lutte, une force, une dimension polémique qui se lisent dans messages, dans les regards, parfois durs, qui émanent des images.
Comme Emmanuel Mille, un des metteurs en scène, l’explique "scénographier une exposition c'est prendre un lieu, une ancienne école et un thème. C’est une lutte qui n’est pas accrochée sur des murs mais fixée sur des pancartes de manifestants. C’est ouvrir les volets, profiter de la lumière naturelle, de la rue, de l'espace public." Yann Moreaux, l’autre scénographe de l'exposition, appuie sur le propos en rappelant que "le graphisme n'est pas qu'un outil de publicité pour vendre des biens de consommation. Il est tout aussi efficace pour dénoncer".
Et il y a encore tant à dire sur cette exposition riche, qui mérite plus d’un coup d’œil, qui pousse a réfléchir davantage, à porter peut-être différemment la lutte contre le réchauffement climatique. Jacqueline Madrennes voit une exposition "inscrite dans le réel de l’urgence, de la gravité et de la mobilisation vitale, labellisée événement Capitale verte, elle est faite pour être diffusée, amplifiée ; C’est ce que la Biennale propose en ouvrant une nouvelle page culturelle d’un récit commun et qu’il nous appartient de construire pour l’avenir ! "
Musée de la Viscose
Ready’Digit, subversions numériques et submersions digitales
Au Musée de la Viscose, lieu chargé d’histoire, c’est le numérique qui impose son art dans la diversité de ses pratiques. Illustrations, d’une incroyable douceur dans les traits et les couleurs pour Léa Zhang, ambiance davantage Cyberpunk pour l’artiste Benjamin Bardou qui travaille autant en images qu’en vidéos autour de la réalité augmentée et une orientation plus abstraite chez Julien Gachadoat, issu de la scène de demomaking, qui se sert d’algorythmes pour ses compositions. Trois ambiances qui se complètent et donnent sa richesse l'ensemble.
En mettant les scénographes à l’honneur en lien direct avec les artistes, le TRACé a voulu créer les rencontres. Virginie Vignon, directrice du TRACé, souligne cette harmonie et "l’engagement, la simplicité et la générosité avec lesquels ils ont travaillés". Une simplicité exprimée par Léa Zhang et Benjamin Bardou, présents lors de ce vernissage, qui ont remercié de la possibilité qui leur a été offerte d’exposer ici. "C’est la première fois que j’expose autant d’œuvres en un même lieu" confie Benjamin Bardou, alors que Léa Zhang vit à Échirolles sa première exposition.
Des rencontres professionnelles et humaines qui transpirent dans la mise en scène. Jacqueline Madrennes a tenu à saluer le "projet à la fois de transformer l'espace et en même temps de lui rendre hommage". Martial Barraut, le scénographe, explique qu’"il a fallu créer un lien, créer un parcours". Méconnaissable, le premier étage du Musée de la Viscose devient un autre lieu, bardé d’écrans, aux couloirs exigus... Pourtant, les regards des Viscosiers surplombant les œuvres numériques directement issues des codes informatiques n’en sont que plus émouvants. Un art numérique certes, mais humain après tout.
Musée Géo-Charles
Marchialy, à livre ouvert : une immersion dans la fabrique du réel
Pour Géo-Charles, c’est la jeune maison d’édition Marchialy qui est en avant. Une maison spécialisée dans les aventures de non-fiction, dotée d’une exigence pointue dans les récits édités, mais aussi d’une attention tout particulière à la forme. La direction artistique portée par Guillaume Guilpart donne à chacun des ouvrages une identité marquée. Et le tout forme un ensemble d'œuvres émerveillant.
Jacqueline Madrennes, dans son discours introductif lors du vernissage, explique "l’exposition illustre parfaitement l'exigence de la créativité. Au contenu s'ajoute un contenant." L’adjointe ajoute que "le parti pris scénographique arrive en écho au travail d'édition." Car comme dans chacune des expositions de la Biennale, il s’agit une nouvelle fois d’une rencontre avec une scénographe, en l’occurrence Mathilde Gullaud. Cyril Gay, cofondateur des éditions abonde et reconnaît la richesse de ce travail commun. "Nous avons rencontré Mathilde qui nous a fait redécouvrir notre propre maison. Une rencontre autant artistique qu'humaine". Clémence Billault, cofondatrice de Marchialy, précise : "On a montré que dans la chaîne du livre il y a énormément d'acteurs qui rentrent en compte". Elle loue aussi cette rencontre et le travail de la mise en scène "L’expo ajoute un sens supplémentaire."
Un sens qui se matérialise, du bureau aux livres, du mur des bouquins exposés aux couvertures non retenues, des outils de création à la scène finale de la visite que prolonge le parc Géo-Charles. Et puis il y a cet espace de consultation, car le livre est un objet qui se touche, qui vit. On peut s’immerger, lovés dans les coussins accueillants disposés, pour découvrir les histoires et s’évader un temps dans cette fabrique du réel.
MB
Infos pratiques :
La Biennale de design graphique, à voir jusqu’au 30 octobre.
Du mercredi au vendredi de 14h à 17h30 et le week-end, de 14h à 18h
Visites guidées (sur réservation : visite@le-trace.fr )