“Le roi des sables” : une fable poétique sur l'existence

La matière, plus précisément le sable, est le point de départ de la pièce, d’une grande beauté, d’une infinie douceur. Son intensité évoque la sagesse, le respect de la magnificence de la nature. Un roi habite un merveilleux château de sable. La splendeur est toutefois éphémère. A chaque équinoxe, l’édifice est balayé par les grandes marées, et à chaque fois reconstruit. Le roi, humble et sage, saura accepter cette lutte contre la nature. “Dans nos créations, on ne dit pas tout, on ne cherche pas à être trop figuratif. Nous laissons toujours de l’espace au public, la place du rêve, des traces où chacune, chacun, fait sa propre lecture”, dit Miguel Garcia Carabias, co-metteur en scène et co-interprète au côté de Núria Alvarez Coll. Nous l’avons rencontré.

Qu’est-ce qui vous a inspiré dans l’histoire de Thierry Dedieu ?
“La démarche de notre collectif pluridisciplinaire consiste à explorer et à utiliser les potentialités expressives de matières premières, la terre, le sable, l’eau, ou encore les fibres végétales comme c’est le cas pour notre prochain spectacle. Après notre première création “Tierra Efimera”, nous souhaitions poursuivre notre travail avec la matière en grains comme point de départ. Nous recherchions une histoire qui mette en scène le sable ainsi que la force, la sensibilité, l’évidence de la nature.
Nous avons trouvé l’album de Thierry Dedieu, un beau et merveilleux récit, simple et complexe, illustré de montages de photos. Le sable est présent dans tout l’imaginaire de l’album. C’est le support de l’histoire, le protagoniste, une source de métaphores. L’ouvrage est un coup de cœur de la compagnie !”

Que raconte ce château de sable de la vie, de l’existence humaine ?
“Cette fable s’adresse aussi bien aux enfants qu’aux adultes. Il y a plusieurs lectures possibles. C’est le reflet du cycle de la vie et de la mort, de l’énergie cyclique de l’existence, du caractère éphémère de tout ce que l’on vit et ce qui nous environne. On a tous été un jour à la plage, et la mer a détruit notre château de sable. Il y a là une matière narrative, plastique, tactile, sensorielle, émotionnelle extrêmement forte, quelque chose de l’ordre de la mémoire en chacun et chacune d’entre nous.
La disparition-reconstruction du château renvoie à un deuil très primitif, au passage du jour à la nuit, puis à la réapparition de la lumière, mais aussi par exemple à la neige qui tombe, puis va fondre, à un objet que l’on possède, puis qui disparaît, en fait à la nécessité à la fois de vivre avec des formes de frustration ou de dépouillement et d’accepter que ça peut ou va revenir.”

Quelles formes artistiques composent la pièce ?
“Il s’agit d’une recherche autour des sens. Les découvertes sur scène ont nourri l’imaginaire sonore et musical. Il y a la lumière, le théâtre d’ombre et d’objet, la marionnette, la manipulation en direct du sable, cela tient aussi du comportement souvent étonnant de la matière.”

Comment évoluez-vous dans la pièce en tournée depuis trois ans ?
“On se rend compte qu’elle commence à vivre pleinement. La vie d’un spectacle est un long parcours ! Le créer demande déjà du temps. En fait, on prend beaucoup plus de plaisir dans la transmission et l’échange avec le public parce que tout est beaucoup plus accompli, évident et riche.”

Propos recueillis par JFL