Résister, de 1973 à 2023
Une explosion graphique pour dénoncer les injustices
Ce 11 septembre marquait le 50e anniversaire de la disparition de Salvador Allende survenue lors du coup d’État de Pinochet. Une date toute trouvée, donc, pour le vernissage au Centre du graphisme de l’exposition Chile Resistencia, la liberté de pensée, produite et organisée par le TRACé. Le visiteur est tout de suite happé par les multiples photos colorées exposées sur les murs de la grande salle. Elles représentent des collages, graffitis, affiches et autocollants réalisés par de nombreux auteurs lors du mouvement de contestation sociale du 18 octobre 2019. Ces photos, prises par Juan Francisco Rojas Henríquez et sa compagne Ellen Margot Rojas Fritz, témoignent de la violence subie par les manifestants dans les rues de la capitale du Chili, mais aussi 30 ans d'injustices. Cette expression artistique, aujourd’hui disparue des murs de Santiago puisque détruite par la Mairie et le ministère des travaux publics, a donc permis d’immortaliser les plaintes et aspirations d’une partie de la société chilienne. « Désenchantement, censure, pauvreté, privation des droits... c’est tout ceci qu’ont voulu dénoncer les artistes lors de ce mouvement social », expliquait Jacqueline Madrennes, adjointe à la culture.
Des photos pour enrayer l'amnésie
En continuant la visite, les pas mènent dans une salle rouge vif, où sont exposées des photos du photographe et journaliste Patrick Zachmann. Après l’arrestation du dictateur Pinochet en octobre 1998, ce membre de l’agence Magnum se rend au Chili rencontrer des victimes de la dictature, notamment des proches de disparu-es. Il choisit de photographier en noir et blanc les lieux de la mémoire chilienne, plutôt que les hommes, « pour forcer l’imagination et traiter de l’amnésie collective et de l’impossibilité de faire le deuil », confiait Patrick Zachmann, présent lors du vernissage. Du désert d’Atacama au stade de foot de Santiago, ces lieux n’ont aucun panneau, aucun mémorial pour se souvenir des horreurs vécues dans ces lieux. « On note aujourd’hui qu’une majorité des Chiliens sont indifférents aux commémorations, et qu’une partie d’entre eux continue de soutenir Pinochet, s’inquiète-t-il. Nous vivons dans un monde, avec la montée de l’extrême droite, où il est important de rappeler l’Histoire, pour analyser le présent. »
Des broderies pour mémoire
La dernière salle de l’exposition, peinte en jaune, attire l’œil curieux. Sur les murs sont exposées des arpilleras de Nivia Alarcon. Ces broderies expriment et dénoncent la violence de la dictature, tout comme les arpilleras des femmes chiliennes à l’époque. Ces tableaux textiles sont réalisés en assemblant des chutes de tissus et des matériaux de récupération pour créer une scène figurative. Une véritable histoire tactile que les Chiliennes ont pu diffuser à l’étranger à l’époque, pour sauver la mémoire collective en dénonçant la dictature. Sur les murs d’en face, les portraits de Pablo Neruda, Violeta Parra, Victor Jara et Gabriela Mistral, réalisés par le street-artiste M4u, ainsi que des œuvres d’artistes internationaux et des photos d’exilés chiliens en Isère enrichissent l’exposition. Celle-ci, le visiteur l’aura compris, à un seul mot d’ordre : résister !
Exposition à retrouver jusqu’au 17 décembre, au Centre du graphisme
Quelques rendez-vous à noter :
- Journées européennes du patrimoine : le 16 septembre à 15h, visite commentée accompagnée de musique chilienne du groupe Witral. Gratuit.
- Apérographiques : les 29 septembre, 27 octobre et 24 novembre à 18h30, visite commentée ponctuée de pauses musicales, lectures, danses et de théâtre. Gratuit.
- Dimanches en famille : les 15 octobre, 12 novembre et 10 décembre à 14h30 : présentation de l’exposition suivie d’un atelier de pratique artistique. Gratuit sur inscription.
- Conférence gesticulée : le 9 novembre à 19h : animée par Antonieta Pardo-Alarcon suivie d’un verre de l’amitié. Gratuit sur inscription.
Infos et inscriptions au 07 48 10 00 14 ou par mail à visite@le-trace.fr